Personne : Lebrun, Tom
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Les textes générés par intelligence artificielle
2023, Lebrun, Tom, Audet, René, Azzaria, Georges
Cette thèse examine le statut littéraire et, dans une moindre mesure, juridique, des textes générés par intelligence artificielle (IA). Elle s'intéresse particulièrement aux textes créés par des méthodes de génération dites « par apprentissage », soit tout ce qui relève de l'apprentissage automatique, également appelé apprentissage machine ou apprentissage statistique. Elle pose l'hypothèse d'un nouveau type de littérature générative, qualifiée de génération par apprentissage, qui propose un rapport intertextuel inédit entre l'œuvre générée et ses sources et fait la preuve d'une autonomie nouvelle de l'œuvre par rapport à son auteur traditionnel autonomie qui se négocie au prix d'une dépendance accrue au corpus de sources utilisés pour l'entraînement du modèle d'IA utilisé. Cette autonomie est pour l'heure inédite dans l'histoire littéraire et n'avait, jusqu'ici, pas encore fait l'objet d'un examen scientifique systématique ; l'objet de cette thèse est de combler cette lacune doctrinale. La thèse examine donc ce que ce nouveau type de littérature en partie autonome par rapport à ses auteurs (mais dépendante envers les sources d'entraînement) fait à la littérature au travers de quatre chapitres distincts. Le chapitre 1 retrace l'histoire de la question de l'autonomie en littérature vue sous l'angle de la contrainte. Après un rappel de l'histoire littéraire en matière de génération informatique (de l'OuLiPo à l'Alamo), elle examine les différents types de génération de textes par informatique, distinguant la génération combinatoire, la génération automatique et la nouvelle génération dite « par apprentissage ». Dans le cas de chacun de ces types, le rôle du modèle informatique, des sources et de l'auteur sont examinés successivement, illustrant une autonomisation croissante du texte par rapport à son auteur. Le chapitre 2 examine le rapport d'appropriation des sources qu'impose tout modèle de génération par apprentissage et ses conséquences d'un point de vue littéraire, notamment par le biais des notions de transtextualité et de transfictionnalité. Trois grands types de textes générés par apprentissage sont distingués et décrits, chacun avec leurs propres spécificités qui permettent d'éclaircir la diversité des pratiques de ce nouveau type de littérature (le texte œuvre d'art, le texte édité, le texte appropriant). Le chapitre 3 est consacré à la question de l'autorité des textes générés par apprentissage, laquelle est remise en question par l'autonomie des créations vis-à-vis de leurs auteurs. Ce chapitre est l'occasion de recentrer le débat sur la posture d'auteurs qui doivent composer avec l'autonomie des systèmes qu'ils utilisent et la dépendance formelle des textes qu'ils produisent envers les sources. Ces auteurs usent de stratégies variées en fonction de leurs intentions, marquant par des discours spécifiques leur position face aux textes. Le chapitre 4 se focalise, quant à lui, sur la question de la lecture et de la réception des textes générés par apprentissage. La diversité de ces pratiques achève sans doute de prouver l'existence d'une grande variété de textes générés par apprentissage autant que leur caractère singulier appelant un renouveau théorique conséquent. Ce renouveau force en partie un retour vers les théories communicationnelles de la littérature, aussi critiquées qu'elles aient pu l'être ces dernières années. La thèse conclut conséquemment non seulement sur l'existence d'un nouveau type de texte littéraire, mais aussi sur la redéfinition profonde de la littérature qui en découle.